Abbaye de Roseland et l'ancienne maison des champs
Ça fait 10 ans que cherche à visiter ce lieu, mais celui ci est toujours fermé, même pour les journées du patrimoine. Pourtant il y a presque une décennie, la mairie avait consacré une enveloppe de 4 millions d’euros pour rénover le site ? Puis peu de temps après cela, j’appris qu’Eve Ruggieri avait organisé un Festival de piano dans les jardins.
L'ancienne maison des champs
Alors, tout le monde se demande pourquoi le site est bouclé ? A l’occasion des journées du patrimoine, je prends la décision de me rendre sur les lieux. Evidemment celui ci est clos. Je m’apprête donc à repartir mais, voila t'il pas qu’ils arrivent deux charmantes dames qui se présentent devant l’entrée. Je leur demande si on peut visiter ?
La mairie n'a rénové que les façades
L’une d’entre elle me répond que non, mais qu’elle connait la présidente de la Fondation qui s'occupe maintenant des lieux et m’invite à me joindre à elle. Quelle chance d’avoir rencontrer Nadège et Florence, sans elles, je rentrais bredouille.
Nous suivons la présidente de la Fondation pour aller au cloitre
L’Abbaye de Roseland fut sans doute une merveille, mais se trouve maintenant dans un triste état. Ouverte aux quatre vents pendant des années, non seulement l’intérieur de l’abbaye est en ruine mais beaucoup de choses ont été pillé.
Des jardins à l'abandon. Ce jour la, visite de jardiniers pour refaire un plan d'aménagement
Roseland n’a jamais été une abbaye mais à l’origine l’une de ces " maisons des champs " que les grandes familles niçoises font construire dans la campagne aux XVIIe et XVIIIe siècles. En 1763, au décès de Jean-Ange Dalmassi, seigneur de Falicon, elle devient la propriété d’une des branches de la plus illustre famille noble du comté de Nice, les Lascaris-Vintmille, comtes de Castellar.
Ils émigrent en 1792 et leurs biens seront confisqués jusqu’en 1815 ou la propriété est achetée par la famille Jaume, puis revendue en 1878 au comte Apraxine, aristocrate russe, grand mélomane, qui offre une école au quartier. Mais la propriété doit l’essentiel de son aspect actuel à Edouard Larcade qui s’en rend acquéreur en 1925.
Les personnes de la Fondations vont avoir beaucoup de boulot
Ce grand antiquaire parisien, riche collectionneur, donateur du musée Massena, originaire du Sud-Ouest, incorpore au bâtiment de nombreux éléments médiévaux, essentiellement du XVe siècle, tant à l’extérieur qu’a l’intérieur, qui étrangement arrivent à s’harmoniser avec le décor en trompe-l'œil (milieu du XIXe siècle) de la façade.
Le cloitre ou ce qu'il en reste !
Ayant conservé le corps de bâtiment central style renaissance italienne et une petite chapelle datant vraisemblablement du XVe siècle, il reconstitua un cloître admirable à doubles rangées de colonnades, alliant le style gothique au roman, en transportant pierre par pierre des monuments de Haute-Garonne voués à la démolition.
La présidente explique le projet à Nadège et Florence qui vont adhérer à l'association
Il aligne vingt six colonnes datant du Xe siècle, de l’abbaye de Muret, et pour des colonnes jumelées du XIIIe siècle, de l’abbaye de Bonnefont en Comminges et qui sont caractéristiques de l’Art gothique. Cet ensemble reconstitué fut célèbre dans les années trente aussi bien à Nice qu’à Paris ainsi qu’en témoigne un reportage paru dans l’Illustration en 1929.
En 1961, le fils d’Edouard Larcade, propriétaire d’une galerie d’avant-garde à Paris, organise dans l’abbaye le premier festival des Nouveaux réalistes (Arman, Yves Klein, etc.) durant les étés 1961 et 1962. Karel Appel y réalise plus de 25 sculptures.
En 1968, la ville de Nice, dans le cadre d’un morcellement de la propriété obtient la nue-propriété du bâtiment et d’une partie des jardins. Le jardin est le produit du savoir-faire de l’architecte paysagiste Octave Godard, originaire de Picardie. Il s’installe sur la Cote en 1907 et dessine plusieurs jardins paysagers dont à Nice ceux de la Villa Bellanda à Cimiez et des Grands Cèdres à Fabron.
Abandonné et ouverte aux quatre vents l'abbaye a subi de nombreux pillages architecturaux
Il imagine à Roseland, dans les années 1923-1927, un jardin d’aspect composite alliant à la géométrie à la française, des allées et pelouses ponctuées de rosiers, une note italienne apportée par les sculptures, vasques, mobilier de marbre blanc, formant contraste avec les sinuosités à l’anglaise de la montée au cloître.
Les essences méditerranéennes, chêne vert, olivier, caroubier, pin d’Alep, cyprès, genet voisinent avec une végétation exotique variée : arbre de Judèe, néflier du Japon, pittospore de Chine, eucalyptus, palmier des Canaries et palmiers nains, cocculus laurifolins, figuiers de Barbarie, aloès, agaves…
Une immense roseraie fut plantée à l'entrée du domaine. L’association des éléments religieux et des roses inspira le nom d'Abbaye de Roseland (pays des roses). Ainsi, entre châteaux rivés et abbaye de fantaisie, les quartiers de l’Ouest niçois composent l’image de la Cote d’Azur qui se superposa, au milieu du XIXe siècle, au passé baroque, méditerranéen et enraciné de Nice et de sa campagne.
A l'origine propriété rurale, l'Abbaye de Roseland a évolué au fil des siècles. Les propriétaires successifs ont su l'adapter à leurs temps. Ainsi, bien qu'en triste état, elle a survécu. Devenue oeuvre d'art, son histoire et ses éléments architecturaux illustrent à merveille l'évolution de la vie sur les collines niçoises.
L'Abbaye de Roseland est un symbole unique. Comme tous les grands domaines des collines niçoises, la propriété avait essentiellement une vocation agricole. Vignes, oliveraies, fleurs, fruits et légumes firent vivre le domaine jusque dans les années 1960. Cette bastide produisait son vin. Un moulin à huile au rez-de-chaussée en témoigne de son activité oléicole.
Pour rénover l'ensemble de l'Abbaye il faudrait 9 millions d'euro
Des photographies et des écrits attestent de l'activité principalement agricole du domaine: dans les parties hautes et basses: des fleurs vendues soit coupées, soit pour la production du parfum: oeillets, giroflées, dahlias, rosiers, orangers, de la vigne, des oliviers. Dans la partie haute, se trouvent des cultures potagères ou maraîchères: poivrons, pommes de terre, oignons, épinard, petits pois. Tomates, haricots, aubergines, melons, sont régulièrement vendus au marché ainsi que les reines marguerites.
Le premier étage n'est pas possible à voir. Risque d'écroulement
Les élevages de lapins, de volailles et peut-être d'autres animaux (dont au moins un mulet) produisent du fumier utilisé comme engrais pour les cultures. Le bois de chauffage est issu du domaine.
Des pièces dans un état lamentable
1968 vit le morcellement de la propriété. D'imposants immeubles d'une vaste résidence de standing remplacèrent les cultures. Fort heureusement, la maison et ses fabriques ne furent ni divisées en appartements, ni détruites. L'Abbaye de Roseland fut en sursis grâce au don de Madame Edouard Larcade à la Ville de Nice à son décès en 1979 (en nue-propriété).
De belles boiseries mais à rénover d'urgence
Mais surtout, elle fut définitivement protégée de la démolition grâce aux actions d’une association. Depuis 2019 « l’association Paysages » installe son projet de Fondation Paysages dans le site de l’abbaye avec le but de créer un Centre International pour les paysages.
Bon courage aux bénévoles.... en bas, l'ancienne chapelle qui est bien sur vide après pillage
Ce sera un lieu de rencontres, d’expositions afin d’aborder avec les scientifiques et les artistes les thématiques les plus urgentes autour de l’environnement. Un laboratoire in situ, soutenu par des entreprises engagées, une résidence pour artistes. Voici les initiatives principale de la future Fondation. Mais avant cela il faut trouver neuf million d’euros pour remette le site en état me dit la présidente…..
Ici l'ancien moulin à huile et les caves à vin
DIAPORAMA ROSELAND